De tous temps, les hommes ont ressenti et délimité des espaces, des lieux, comme étant sacrés. En ces lieux, reconnus comme sacrés, furent érigés au fil du temps des mégalithes, des temples, des églises et des cathédrales. Et cette succession chronologique confère à ces lieux un parfum intemporel, un parfum d’éternité.
Il faut toutefois prendre un peu de recul par rapport au mot « sacré », car on l’oppose souvent au « profane » ce qui implicitement peut créer une forme de hiérarchie. Or, nous considérons que la Nature en elle-même est sacrée. Ce qui définit l’espace sacré est donc l’intention que nous y plaçons. L’espace sacré s’appuie ainsi sur un ressenti personnel qui peut être subjectif.
Se réunir en cercle durant un rituel procède de la construction de l’espace sacré, zone délimitée géographiquement dans l’espace, au sein duquel nous nous inscrivons dans une relation au Sacré. L’espace sacré se révèle alors à l’intérieur de soi et nous pouvons le créer, l’investir, aller à sa rencontre et nous y sentir en pleine sécurité et sérénité quoiqu’il se produise autour de nous.
Lorsque nous ritualisons en cercle, trois espaces co-existent physiquement et spirituellement :
– Un premier espace délimité par les pierres qui entourent le foyer central : à l’image du cercle de pierres qui entourait le bras de Nuada. C’est le domaine des Dieux, le cercle qui entoure l’axe vertical transcendant.
– Un second espace délimité par les participants du rituel. Cet espace est dynamisé par les déplacements circulaires des femmes et hommes qui constituent l’assemblée. C’est un mouvement dans le plan horizontal qui combiné à celui vertical du foyer forme une spirale, une hélice.
– Un troisième espace qui est extérieur à ce cercle et que nous pouvons associer à l’espace du quotidien.
Au commencement de toute cérémonie, une requête est adressée aux Dieux et Déesses afin de placer le cercle en dehors de l’espace et du temps. C’est comme si nous ouvrions une fenêtre sur l’Autre-Monde, le monde du Sidh : un espace, ou un non-espace, ailleurs où le temps n’existe pas. Nous passons alors d’un espace physique à un ailleurs, à un autre niveau. L’instant vécu se situe alors hors espace-temps, il s’inscrit dans la trame de l’Univers. Qu’importent le où et le quand, il se grave dans le microcosme de nos cellules et dans le macrocosme de l’Univers.Cette première étape est nécessaire afin de monter le taux vibratoire qui permettra de recevoir les messages que nous avons à recevoir, puis elle est suivie de l’ouverture aux quatre directions. Ce 4 c’est la matière : la nécessité d’être ancré, d’incarner l’esprit dans la matière, tout comme la lame de l’Empereur dans le Tarot de Marseille associée à l’arcane de la Lune. C’est une invitation à travailler en parallèle l’humide et le sec, à aller puiser notre potentiel au tréfonds du caché et à puiser au sein des eaux de notre inconscient des eaux profondes et le faire émerger sur terre. Lorsque nous
plongeons dans nos profondeurs, nous en ressortons avec un espace agrandi. Annick De Souzenelle parle d’aller chercher notre potentiel dans l’ombre afin de l’agrandir et d’agrandir notre espace sacré.
Lorsque nous posons les 4 directions autour / dans l’espace sacré en rituel, nous posons l’ancrage. Nous nous présentons au monde invisible en disant « Ici et maintenant j’en suis là, je suis dans le 4 et je suis ancré » puis nous ouvrons l’axe terre-ciel, l’axe du monde, et nous commençons alors à pénétrer dans ces 3 espaces et dans le monde sacré.
Dans l’expérience de l’espace sacré, nous associons beaucoup espace / non-espace et temps / non-temps. Or, non-temps et non-espace sont aux prémices, à l’origine, de l’univers. A travers cette expérience, nous sommes dans une énergie de démiurge, dans le fait de créer tel une divinité créatrice. L’espace sacré devient source de création et même de co-création, puisque chaque participant est dans la même dynamique durant le rituel. Nous sommes alors tous dans un axe de co-création, chacun avec notre être individuel. Mais puisqu’il n’y a ni espace, ni temps, les limites entre les individus s’estompent et ensemble nous devenons une entité collective. Espace physique, espace intérieur et espace divin s’alignent alors et ne plus qu’un dans une parfaite syzygie.
A l’issue de la célébration, nous rendons l’espace sacré au monde profane. La fermeture des portes permet alors de rendre le lieu à sa vie normale, à sa réalité ordinaire. Mais l’empreinte énergétique de l’espace sacré demeure. Cette fermeture est aussi une façon de revenir pour nous-mêmes à la vie ordinaire, profane. Nous amenons avec nous dans le monde profane fort et rempli ce que nous avons cultivé et reçu dans le monde sacré. En rendant l’espace au monde profane, nous démontons tout et remettons dans la Nature les choses telles qu’elles étaient. Ainsi, nous respectons la Nature et la reconnaissons telle qu’elle est.
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Source: https://blog.lasentedelawen.org/2019/11/24/paroles-de-druides-2-espacesacre/
Novembre 2019, La Sente de l’Awen (https://lasentedelawen.org).